Le Michelin détrône le pape de la cuisine.

Pour L'auberge qui fait peau neuve le guide Michelin choisi l'annus horribilis

Pour L’auberge qui fait peau neuve le guide Michelin choisi l’annus horribilis

Dernier épisode en date d’un tsunami culinaire…Le chef Christophe Müller, Meilleur Ouvrier de France, executive chef du restaurant et des brasseries de Paul Bocuse, annule sa venue à Sarlat ce week-end pour la Fête de la Truffe. Il a décidé de rester auprès de ses équipes pour gérer la crise suite à la décision du Guide Michelin qui met un terme à la suprématie de la triplement étoilée Auberge du Pont-de-Collonges. Ce restaurant créé par Paul Bocuse, décédé voici près de deux ans, arborait trois étoiles depuis 1965.

C’était peut-être le seul qu’il ne fallait pas toucher. Les toques sont en noir.
Les réactions se déchaînent après l’annonce de la perte d’étoile du restaurant de Monsieur Paul. Si François-Régis Gaudry y voit plutôt « une volonté du Michelin de se moderniser et de faire le ménage avec des pratiques un peu douteuses », Périco Légasse, autre journaliste et critique gastronomique, ironise ainsi : « Cette décision n’a aucune importance. Paul Bocuse est une institution qui dépasse d’assez loin le Guide Michelin. Ce n’est pas une étoile qui va y changer quoi que ce soit. En revanche, la cuisine française est en deuil aujourd’hui : nous avons perdu le Guide Michelin. Ça, c’est une grosse perte pour la cuisine française. »

Paul Bocuse fut mon ami et compagnon de route pendant 50 ans dit Georges Blanc. Je suis triste pour l’équipe qui reprend le flambeau à Collonges.
Guillaume Gomez, chef des cuisines du Palais de l’Elysée, regrette que « tout le travail mené depuis des mois, pour être le plus rigoureusement en accord avec l’excellence, n’aura pas été reconnu ».

Le chef Régis Marcon s’attriste également : « Ce n’est pas Paul-Bocuse qui perd une étoile, mais toute son équipe ».

Coup de com.

L’institution du Guide Michelin, reprise en 2018 par Gwendal Poullennec, se justifie en estimant que «la qualité de l’établissement demeurait excellente mais plus au niveau d’un trois étoiles». Ne tenterait-elle pas plutôt de bousculer le monde de la gastronomie française  déjà ébranlée par l’alliance avec Tripadvisor et le site LaFourchette et de faire le buzz , face à la concurrence de l’Internet, avant son prochain show pour  vendre son guide papier 2020?
En un an et demi, trois chefs emblématiques ont été détrônés : Marc Haerbelin de l’Auberge de l’Ill (Alsace), Pascal Barbot, de l’Astrance (Paris) et  Marc Veyrat de la Maison des bois à Manigod (Haute-Savoie). »C’est comme si on détrônait le pape tonne le chef savoyard en guerre ouverte contre le Guide Michelin, et qui dénonce une « agression contre le patrimoine culturel français ».
Jean-François Mesplède, ancien du Michelin, reconnaît une « crise de jeunisme ». « On a l’impression qu’il faut brûler aujourd’hui ce qu’on a adoré hier », explique-t-il.
Décision absurde pour les uns, trop tardive pour quelques autres… 
Dans un communiqué publié ce vendredi la famille Bocuse et l’équipe à la tête du célèbre restaurant ont exprimé leur émotion. Et leur volonté de ne pas en rester là. Alors que le restaurant est fermé pour travaux, les signataires soulignent en effet avoir présenté un nouveau concept, « La Tradition en Mouvement », dès le mois d’octobre 2019, pour répondre aux possibles critiques des inspecteurs du Michelin. « Jugée exceptionnelle par bon nombre de nos clients, d’experts gastronomiques ou journalistes, cette expérience prendra toute sa dimension dès notre réouverture le vendredi 24 janvier« , assurent-ils dans ce même texte.

Rien ne justifiait de toucher à l’icône. Sauf à créer une étoile d’or pour Bocuse, en hommage au créateur de la « cuisine moderne ».

Le guide Michelin dévoilera son palmarès le 27 janvier. A moins, c’est dans l’air du temps, qu’après les bonnets rouges et les gilets jaunes, les toques noires ne s’en mêlent…

Thierry Bourgeon/janvier 2020/laradiodugout.fr