GOT Jean Pierre, affichiste de goût

 

Jean Pierre Got au travail ©DR

Jean Pierre Got au travail ©DR

Ancien agent commercial en vins, Jean-Pierre Got, 63 ans, autodidacte globe trotter se définit aujourd’hui comme affichiste plutôt qu’artiste ou graphiste.

Depuis 2006, notre affichiste vit de son art en précisant, avec humour, que sa femme, professeur d’anglais, possède la sécurité de l’emploi et peut, le cas échéant, faire bouillir la marmite. “Vendre m’a appris l’humilité et à écouter ce que veut le client. A chaque fois que je fais une affiche, j’apprends quelque chose et je progresse dans mon métier de “dernier affichiste français“ comme me nomment les Américains qui aiment notre patrimoine artistique Belle Epoque/Art Déco dont je m’inspire sans nostalgie. 

Ni artiste ni graphiste, seulement affichiste

Dynamique et efficace, Got surfe sur la crise en se multipliant et en se bougeant. Il sait que l’affiche est un art éphémère qu’une petite élite d’hommes d’affaires californiens, qui ont investi dans le vin, aujourd’hui collectionne. A lui de le faire fructifier en gérant son image de „dernier affichiste français“ en bon père de famille. Pour arriver à ses fins, il ne se contente pas de sa notoriété outre-Atlantique. En 2009, Jean-Pierre a exposé en Grèce où il a dégusté des vins grecs intéressants et à Bergerac, sa ville natale, au Musée National du Tabac. Et surtout fin novembre dernier en Chine, à Canton.

« Ca a été une sorte d‘électro-choc pour moi car j’ai constaté que les Chinois étaient plus proches de nous que je le pensais et ils m’ont poussé à expliciter le sens caché de mes diverses affiches“.

C’est en 1992 que ce commercial en vins à l’exportation a franchi le Rubicon en passant de l’autre côté du miroir et effectué son « coming out » artistique. A la demande d’un négociant bordelais, « le Christian Dior des vins » qui avait besoin de créer une affiche le mettant en scène pour célébrer l’anniversaire de son établissement. Pour un coup d’essai, ce fut un succès vite transformé, à tel point que son affiche, qui capte l’attention du badaud, a été miniaturisée immédiatement en étiquette de vin rouge en Allemagne. Deux ans plus tard, l’artiste Got récidive en dessinant cette fois une femme avec une grappe de raisin pour sa deuxième étiquette.

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le dernier affichiste français ©DR

En 1999, J.P. Got, qui a creusé son trou d’affichiste, rebondit en saisissant la balle sud-est au rebond… Lorsque la Compagnie Patrimoniale du Vin lui avoue son besoin d’une antenne à Bordeaux, ville carrefour et mythique pour le vin. Il profite de sa double casquette de commercial et d’artiste pour bien s’implanter en Californie, notamment à Napa où l’on identifie volontiers amour du vin et culture française. Tant et si bien qu’en 2002, un importateur californien lui glisse : „ Tes affiches m’intéressent plus que tes vins“. C’est la consécration pour lui et aussi un bon prétexte pour changer de métier et de vie sans changer de monde.

Alors qu’en France, la vente d’affiches n’est guère passée encore aujourd‘hui dans les moeurs commerciales, dans la Napa Valley on lui achète 15 dollars l’affiche pour la revendre 25… sans état d’âme.

« Je m’inspire de ce que les grands affichistes ont fait, comme Savignac, faussement naïf et Cappiello, un affichiste aussi caricaturiste qui invente une image sans rapport avec l’objet à promouvoir afin de mieux attirer l‘attention du passant dans la rue. Je m’impose toujours un cadre précis avec des sujets et des couleurs limités en jouant avec le style français Belle Epoque- Art Déco que les Américains appellent „joie de vivre“. Je peins mes affiches à la gouache rehaussée au pastel et les imprime, c’est très important, en France, à Bordeaux ».

Jean-Pierre Got  rêve tout haut d’exposer sa centaine d’affiches et de faire mieux connaître ce genre dit mineur et art familial né dans la rue pour attirer l’attention du plus grand nombre de consommateurs. C’est tout le mal qu’on lui souhaite, même s’il sait que nul n’est prophète en son pays et que son avenir affiche des yeux bridés. Salut „l’artiste“ qui, sans se prendre au sérieux, sait communiquer autour du vin et vendre le patrimoine affiche style Belle Epoque !

Christian Duteil / mars 2016/  pour laradiodugout.fr